DESIERTO est le premier film réalisé par
Jonas Cuaron, fils d'Alfonso - après quelques court-métrages, dont un lié à
Gravity et proposé en bonus sur le DVD. Alors, bon, c'est toujours plus facile pour un "fils de", c'est clair. D'autant plus quand papa (et tonton) produit et que des collaborateurs habituels de la "bande mexicaine" (Cuaron, Inaritu, Del Toro...) t'aident à faire ton film.
Reste que ça ne doit pas cacher que le gars est doué. Tout comme son chef opérateur quasi débutant itou,
Damian Garcia, auquel on voit bien un destin à la
Emmanuel Lubezki.
Comme
Gravity (ou
Mad Max Fury Road - en moins bien que ces deux exemples, quand même !), le film repose sur un concept simple et un scénario totalement épuré. En gros : une chasse à l'homme entre une bande de migrants mexicains et un psychopathe armé (et son chien, terrifiant !) qui ne veut pas les voir envahir "son pays". Le film pourrait être une vision de l'Amérique Trumpienne qui veut ériger des murs pour s'isoler des migrants, et de sa violence inhérente... il ne fait qu'effleurer ce genre de sujets. C'est ce qui l'empêche d'être foncièrement réussi. Pas qu'un film doive forcément avoir du sens. Mais en hésitant entre le pur film de genre et le "grand sujet", le film finit par faire sentir qu'il pourrait être beaucoup plus que ce qu'il est; et par montrer ses limites.
Il préfère de toute façon se parer des atours d'une série B nerveuse et violente, oppressante et ultra-efficace. De ce point de vue, c'est totalement réussi. Le film est une épreuve pour les nerfs du spectateur, qui se trouve embarqué aux côtés du groupe de pauvres gens qui essaient d'échapper à un ennemi qui est constamment derrière eux, prêt à les buter n'importe quand et sans pitié. On suit le calvaire des survivants de moins en moins nombreux, se concentrant autour de
Gael Garcia Bernal (seule tête d'affiche du film). On les accompagne dans la chaleur, au milieu d'une nature hostile, courant, suant, tremblant de peur et de tension. De l'autre côté du fusil de chasse,
Jeffrey Dean Morgan (le
Negan tout nouveau de
Walking Dead, dans un rôle très proche, finalement !) est effrayant. Tout comme l'est son chien, aussi violent/borné/raciste que son maître.
Cuaron fils s'inscrit ici dans la droite lignée de son père, et de ses collègues et compatriotes - on pense aussi par moments à
The Revenant. Dans cette manière de penser le cinéma comme une expérience viscérale qui doit immerger le spectateur dans son univers; plus que comme une histoire avec une progression et des personnages complexes. Il n'a pas encore la maîtrise technique et narrative de ses aînés - mais comparé à la plupart des premiers films, on n'en voit pas beaucoup qui ont cette gueule !
Note = 4,5/6
(à noter, aussi : la musique est signée
Woodkid - et elle est plutôt bien, dans le genre électro-planant)