Mais c'est quoi encore ce bordel ? Ca fait deux fois en peu de temps que je ne sais pas trop quoi penser d'un film - ça ne va plus du tout ! (voir Beasts of the southern wild en rapido).
Pour le coup, je pense que j'en aurais fait une critique très positive si je ne l'avais pas vu avec Cyrille, qui n'a pas trop aimé sous certains aspects. Je ne veux pas dire par là que je suis influençable, mais c'est vrai qu'en en discutant en sortant de la salle, on a soulevé plein de défauts qui plombent le film - par ailleurs tout aussi bourré de qualité à l'inverse.
The Place Beyond the Pines, c'est donc le gros buzz du moment, le film sur lequel toute la critique se touche le zguègue (ou la moule), le nouveau phénomène du polar américain indépendant, le digne héritier de James Gray, et j'en passe... (en même temps, c'est bien semblable à du Gray en effet : tout autant tiraillé entre le sublime et le lourdaud).
Une sorte de "méta policier" déguisé sous le drame et la tragédie, qui veut brasser de grands thèmes au delà du genre, peindre le portrait d'une Amérique rurale loin des feux des projecteurs. Et qui se pare en plus des atours du "film concept", avec ses trois parties enchaînées qui tournent chacune autour d'un (ou deux) personnage au sein d'une histoire plus vaste.
Le problème déjà de cette structure narrative, c'est ici que la première partie autour de Ryan Gosling écrase les deux suivantes. Le film commence tellement bien et roule à fond sur ses rails pendant 50 minutes, que la suite ne peut que décevoir. La partie centrale autour de Bradley Cooper est pleine de bonnes intentions mais molle. La dernière qui se concentre sur leurs fils respectifs est mieux foutue, mais beaucoup trop tirée par les cheveux.
Mais passons encore là dessus, c'est totalement subjectif.
Ce qui tire le film vers le bas, par contre, c'est qu'il ne peut pas s'empêcher d'en faire toujours trop. Cyrille me demandait en sortant si c'était un premier film d'un mec qui avait peur de ne jamais en refaire et qui voulait tout mettre ici - même pas, mais c'est vrai que c'est à ça que ça ressemble. Du coup, ça dure 2h20 là où 1h30 aurait largement suffi. Je me suis pas vraiment ennuyé perso, mais c'est clair qu'on voit le réalisateur tirer à la ligne inutilement plus d'une fois.
Et surtout, qu'est-ce que c'est lourdaud ! Et que je t'en fais 15 tonnes sur la symbolique lourdingue pour te dire que je vais te parler de filiation (avec une grande découverte scientifique à la clé : le gène de la moto ! ). Et que je t'en rajoute une louche pour te montrer que le personnage est une gros arriviste. Et que je te remets du gras sur la tragédie, les coups du sort, la faute à pas d'bol...
A tout ça, il faut ajouter encore le côté totalement artificiel d'une partie du fil m(passé le premier segment, donc). Pour coller à son concept, Cianfrance est obligé de tordre son scénario, de multiplier les coïncidences, de créer des péripéties auxquelles on ne croit pas une seconde. Au bout d'un moment à s'exclamer "oh mais quel hasard !", on finit par se lasser.
Alors après, oui, évidemment, c'est du vrai, bon et pur cinéma solide comme on l'aime. Superbement réalisé, aux images magnifiques, aux acteurs excellents (Ryan Gosling, Bradley Cooper, Eva Mendès - pas que bonne mais quand même, Mahermachin Ali, Ray Liotta, Ben Mendelsohn, les deux jeunes dont un vu dans Chronicle, Bruce Greenwood, Rose Byrne - rien que ça !), à la musique sublime. Si on enlève ses incohérences et ses gros traits, le scénario est intéressant. Y'a plein de scènes qui tuent et les 50 premières minutes déchirent.
Mais c'est pas la bombe nucléaire à laquelle on était en droit de s'attendre.