Décidément, en ce début 2015, je ne cesse de replonger dans les colonies de mon enfance. Après « l’affaire Grauzone », une nouvelle anecdote captivante.
Je me souviens d’une « soirée énigmes » où il fallait reconstituer toute une histoire à partir d’un argument de base, à coup de questions où le conteur ne pouvait répondre que par oui ou non. En l’occurrence, le point de départ était celui-là : un homme se rend au restaurant en bord de mer où on propose du cormoran au menu, mets particulièrement rare. A peine a-t-il gouté le plat qu’il rentre chez lui et se suicide. Pourquoi ?
A force de questions, c’est surtout moi qui avait réussi à résoudre l’énigme à l’époque, ce qui ne m’avait pas rendu peu fier. Et même, m’avait permis d’emballer, ayant tapé à l’occasion dans l’œil d’une fille mignonette (me semble-t-il) – qui a dit que l’intellect ne pouvait pas attirer les filles ?
Pourquoi je vous raconte ça ?
Parce qu’il y a dans le dernier livre en date de
Fred Vargas une partie de l’histoire située en Islande qui correspond exactement à la résolution de cette énigme de mon enfance. Et que, donc, je ne dévoilerai pas ici. L'autre aspect du livre amène Adamsberg et ses sbires habituels du commissariat du treizième aux trousses d'un tueur qui décime les membres d'un cercle très sélect reconstituant les débats de l'Assemblée sous la Terreur; avec un Robespierre plus vrai que nature.
Comme l'auteure l'explicait à
La Grande Librairie, elle a bataillé ferme pour pouvoir relier ces deux histoires qui s'étaient imposées à elle.
Et il faut bien dire qu'elle y parvient très bien. Si l'explication finale (assénée dans une fin dans le style
Agatha Christie ou
Conan Doyle)est très alambiquée, elle découle de tout un tas d'éléments mis minutieusement en place tout au long d'un livre à la fluidité impressionnante. Contrairement à son habitude, Vargas reste collée aux deux enquêtes en parallèle, et va très peu faire évoluer la vie personnelle de ses personnages. Tout juste y revient-elle vers la fin, en instaurant une rivalité nouvelle entre Adamsberg et son fidèle commandant Danglard. Peu d'à côtés, donc, dans ce livre qui fonce à toute vitesse. Ce qui n'empêche pas l'auteur de continuer à nous régaler des caractères trempés de toute la clique, de partir dans des digressions langagières savoureuses, ou de balancer des anecdotes historiques étonnantes.
Probablement pas un des meilleurs crus des enquêtes de l'inspecteur, mais un bon cru, assurément. Sans compter que ça fait toujours plaisir de se replonger dans cette série de polars au charme fou, définitivement pas comme les autres.