Vu ce soir (pendant le foot)...
Que dire ? Je sais pas trop, en fait ! C'est du cinéma totalement expérimental, sensoriel, qui joue sur le trifouillage de l'image et du son, non narratif. Plus que jamais, le terme d'OVNI cinématographique est approprié ici. On pourrait convoquer les références pour tenter d'expliciter la chose. Kubrick évidemment, et son 2001, mètre-étalon de tout film métaphysique. Les deux David, forcément, Cronenberg et Lynch, pour l'inquiétante étrangeté de l'oeuvre. L'homme qui venait d'ailleurs de Nicholas Roeg avec Bowie. Enter the Void de Gaspar Noé. Ou même le gros navet La Mutante, dont ce film serait une version arty.
Mais même en mélangeant tout ça dans un grand mixeur, on n'aura qu'une vague idée de ce que ça donne. Et ça ne dira rien de l'atmosphère poisseuse et angoissante des paysage désolés d'Ecosse, du grand vide existentiel de cette extraterrestre qui découvre l'humanité.
Et puis, il y a Scarlett Johansson, totalement hallucinante. Pas parce qu'on la voit nue dans 3 ou 4 scènes notamment celle des captures d'écran ci-dessus, qui marquera les mémoires. Mais plutôt parce que c'est vraiment l'idée de casting idéal pour le film. Sex-symbol du moment, objet de toutes les attentions, personnalité hors normes s'étant hissée au dessus d'une époque médiocre, l'actrice est parfaite dans le rôle parce qu'elle abolit la frontière entre la fiction et la réalité. Autant qu'une extraterrestre qui observe les hommes et se transforme à leur contact, on assiste au "phénomène" Scarlett qui tente de comprendre son pouvoir de fascination. Et alors, lorsqu'elle s'observe nue devant son miroir, le trouble ne nait pas (que) du dévoilement d'un fantasme à son public lascif, mais de cette stupéfaction que l'actrice retranscrit à merveille. Sa précence charnelle et sensuelle ici apporte le complément et le contrepoint au Her de Spike Jonze, où elle bouffait l'écran sans jamais y apparaître (et était excellente itou).
C'est typiquement le film qui va cliver entre ceux qui vont totalement y adhérer - fascinant, puissant, conceptuel, parfois terrifiant, malsain... - et ceux qui vont le rejeter - chiant, poseur, prétentieux, incompréhensible... Y'avait pas assez de monde dans la salle pour battre un record du nombre de spectateurs qui se barrent au fur et à mesure de la projection, mais c'était spectaculaire.
Qu'est-ce que j'en ai pensé, moi ? J'ai trouvé ça mortel. Plus qu'un film, une expérience comme on en vit peu, finalement. Et ce que j'ai trouvé vraiment intéressant, c'est qu'au delà des expérimentations visuelles, le film raconte une histoire et provoque des sensations; il ne se résume pas à de la branlette cinématographique stérile. D'ailleurs, c'est tout sauf abscons et obscurément complexe.
En sortant de la salle, je me disais que quoi qu'on pense du film, c'est le genre de métrage qui prouve qu'on peut encore attendre quelque-chose du cinéma en 2014. Un cinéma qui peut encore nous faire vivre des choses et nous surprendre en nous entraînant loin des sentiers battus. Rien que pour ça, même si certains crieront à la merde intégrale, Under the Skin est un film précieux.
Pas de note, bien sûr, comment noter ça ?
(tiens, après vérification dans mes précieux fichiers de stats, je vois que j'avais vu le précédent film de Glazer, Birth (avec Nicole Kidman)... que j'avais détesté ! Il se semblait bien en avoir un vague souvenir négatif. Il me semble bien que c'était le même type de film très zarb'; qui cette fois n'avait pas fonctionné sur moi. Peut-être que c'est aussi une histoire d'état d'esprit du moment)