L'OCEAN AU BOUT DU CHEMIN est un bon Neil Gaiman, sans plus. Il souffre de ce qu'on pourrait appeler la "crise de l'auteur culte", qui touche aussi un mec comme Tim Burton dans le domaine du cinéma. Cette crise qui touche des artistes à l'univers très personnel et défini, qui finissent par y tourner en rond et n'ont plus rien à dire à un moment. ça reste toujours plaisant d'explorer cet univers, et les gars arrivent encore à nous toucher, nous émouvoir, nous émerveiller... mais plus à nous surprendre.
C'est accentué ici par le fait que, de son propre aveu, Gaiman a voulu s'éloigner du pur genre fantastique et merveilleux qui est le sien. D'écrire en quelque sorte un "livre sérieux". Il l'a d'ailleurs écrit en priorité pour sa femme Amanda Palmer, qui n'aime pas le genre. C'est vrai qu'on ressent une sorte d'affadissement dans les thèmes, et un assagissement. Qui a été payant puisque le livre a été formidablement accueilli, et a reçu le glorieux prix de "Book of the Year" en Angleterre.
Mais heureusement, ça reste encore du Gaiman pur jus. Un conte de fées parfois noir et toujours tordu, qui s'inscrit dans un imaginaire très anglais en prenant appui sur l'enfance de l'auteur. Le livre ne s'adresse pas directement aux plus jeunes comme pouvaient le faire Coraline ou Nobody Owens, mais il devrait leur plaire. Tout comme aux adultes amateurs de l'auteur, à condition de savoir qu'on n'y retrouvera pas les délires les plus saisissants d'un American Gods, De Bons Présages ou Neverwhere.