Et voilà, au temps pour un parti qui se veut exemplaire et à 'l'opposé des "magouilles de l'UMPS" :
Un an d’inéligibilité : la peine est conforme aux réquisitions de la rapporteure publique à l’encontre de Fabien Engelmann, maire FN de Hayange. L’inéligibilité est prononcée «en cas de volonté de fraude», avait-elle rappelé le 16 décembre. Les comptes de campagne du candidat frontiste ont été rejetés par la commission nationale le 6 octobre, suite aux documents remis par son ex-première adjointe, Marie Da Silva. Un total de 1 939 euros n’a pas été réglé par le mandataire financier, échappant ainsi au dispositif de contrôle prévu par le code électoral. «Un manquement d’une particulière gravité et au caractère répété», a insisté la magistrate. 14% du total des dépenses est «litigieux», «on est bien loin des seuils admis», a-t-elle déploré, évoquant des affaires dans lesquelles la justice a fermé les yeux, «pour des menues dépenses». A l’audience, la magistrate a donné le détail des sommes retenues, toutes réglées par Marie Da Silva : 75 euros de frais postaux, 55 euros de galettes des rois, 234 euros de porchetta et deux tracts pour 1 575 euros.
«Allégations». Dans ses écrits transmis au tribunal, Engelmann s’est défendu, affirmant qu’aucun timbre n’avait été utilisé durant la campagne, que seule l’équipe avait mangé la galette et qu’il n’avait pas jugé utile d’intégrer la porchetta dans la mesure où la dépense a été compensée par les recettes de l’apéro saucisson-pinard. La rapporteure a balayé : «Il n’apporte aucun élément à l’appui de ses allégations.» En fait, le maire a joint à son dossier un article de presse, censé le dédouaner, et qui l’enfonce : «On y lit que la galette a été consommée à l’occasion de l’inauguration du local de campagne où des journalistes et des sympathisants étaient invités», a-t-elle poursuivi. Quant aux deux tracts, imprimés à quelques jours du scrutin et payés par Marie Da Silva en mandat-cash, Engelmann a fait valoir qu’il ne s’agissait que «d’un dépôt de garantie» effectué «en urgence» par sa colistière, le mandataire n’étant «pas joignable». Et de minimiser, arguant que Marie Da Silva a été remboursée et la somme intégrée à ses comptes. Fabien Engelmann est même allé jusqu’à soutenir que tout ceci s’était passé «à son insu»… Un argument encore inédit dans la bouche de l’édile qui s’en tenait habituellement à «l’erreur technique». Engelmann serait, selon lui, «victime des agissements d’un tiers», en l’occurrence Marie Da Silva. A la barre, le frontiste, sans avocat, s'est accroché à sa «bonne foi», «sa sincérité» : «Il n’y a eu aucune volonté délibérée de ma part de frauder la loi électorale.»
La rapporteure n’y a pas cru, rappelant à la cour le montage mis sur pied pour le remboursement de la pseudo-caution : «Un chèque du prestataire [chargé de l’impression des tracts, ndlr], établi non pas au nom de la candidate colistière, mais de sa belle-fille.» Et Fabien Engelmann était parfaitement au courant, puisque ce montage financier, il en est l’ingénieur. Libération a publié le 4 novembre un enregistrement d’une conversation téléphonique, datée du 21 août, dans laquelle il explique à son ex-première adjointe : «Je te l’avais donné [le chèque] et je t’avais dit :"Après, tu l’encaisses par qui tu veux." […] On voulait pas que ça soit toi ni moi. […] c’était convenu comme ça, Marie […] Je t’avais demandé d’encaisser ce chèque-là par un tiers.»
«Coup monté». Contrairement à ce qu’Engelmann a annoncé au lendemain de la publication de l’enregistrement compromettant, qu’il qualifiait de montage, il n’a pas déposé plainte contre Libération. Ni contre Marie Da Silva, qu’il a menacée à plusieurs reprises de poursuivre pour diffamation. Au sortir de l’audience, elle a dit sa«satisfaction»,«la justice n’a pas été dupe et a retenu la fraude», et rappelle que le parquet de Thionville a ouvert une enquête au pénal, après sa plainte pour abus de confiance, de bien social et harcèlement. Les micros se sont tendus vers Engelmann. Couplet :«on veut me détruire», «le dossier est un coup monté» ; refrain :«bonne foi», «sérénité». Mais lorsqu’on l'a interrogé sur le chèque encaissé par la belle-fille pour couvrir la fraude, il a dénoncé Libération«journal militant». S'est fâché tout rouge, s'est braqué, a renvoyé à un vieux communiqué, et s’en est allé.
Début octobre sur France Inter, Marine Le Pen avait estimé qu’en cas de condamnation, Engelmann devrait démissionner de la mairie et rendre sa carte du parti. Lors du dernier congrès du FN, il n’a pas été reconduit au sein du bureau politique.
Et pour ajouter au pataquès, en cas de nouvelles élections municipales à Hayange, les habitants ne pourront peut-être pas compter sur le candidat divers droite, arrivé deuxième aux municipales, Thierry Rohr. Affaire suivante de l’audience le 16 décembre : la cour apprécie le rejet des comptes de campagne de ce dernier. Rohr a imprimé six tracts, dont un livret de 19 pages, au prix imbattable de 3 400 euros et ses comptes n’ont été visés par aucun expert-comptable. Le rapporteur public propose un an d’inéligibilité à son encontre. Gilles Wobedo, président du comité de vigilance républicaine Hayange plus belle ma ville, se désole : «La majorité des Hayangeois a donc voté pour des gens qui n’ont pas les mains propres.»
(source : Libé)