Infernal Love est un album qui m'a toujours laissé sur le cul, et qui lors de cette réécoute pour sa sortie en édition Deluxe continue de m'impressionner et de m'interloquer. Après le triomphe de Troublegum, Therapy pouvaient faire ce qu'ils voulaient, et c'est exactement ce qu'ils ont fait. Ca donne ce disque très personnel, tournant résolument le dos au bourrinage du précédent, tout en n'étant absolument pas commercial, piochant partout aux sources de toutes les références du groupe. Comme beaucoup à l'époque (Smashing Pumpkins en premier lieu), Therapy mêle ici son metal de base à tout un tas d'influences new-wave, électro, blues-rock et autres.
Comme Truffaut et Hitchcock parlaient de "grand films malades", le disque est une sorte de "grand album malade", partant dans tous les sens, follement ambitieux, tordu, complètement délirant, par moments totalement enthousiasmant et à d'autres absolument à côté de la plaque... C'est un album fou, déroutant, qui déstabilise l'auditeur, pas facile au premier abord. Les chansons jouent sur les ambiances, les ruptures de ton, vont chercher là où on ne les attend pas. Il y en a 11, soit 3 de moins que dans l'album précédent, mais ça dure 10 minutes de plus - avec des transitions articulés autour d'instrumentaux électroniques... C'est assez indescriptible, en fait, totalement inattendu; en fait, les passages les plus faibles de l'album sont les plus attendus, ceux où le groupe se jette un peu facilement dans ce qu'on attend de lui (Misery, Jude the Obscene, Loose...). . Pour le reste, soit le groupe ajoute des expérimentations sonore à sa violence primitive et aboutit à des morceaux hybrides impressionnants (l'énorme Epilepsyqui ouvre l'album, le single monstrueux Stories, la conclusion explosive 30 Seconds), ou se lance nous balance des merveilles conceptuelles planantes et puissantes dont le sommet réside dans le diptyque A Moment of Clarity / Me Vs You - 2 chansons hallucinantes qui remuent les tripes et font remonter des réminiscences de tout ce que j'aime dans la musique pop-rock. Et je ne parle même pas du sommet absolu Diane, reprise de Husker Du devenue mythique où les instruments à cordes viennent foutre la pâtée aux instrumentations rock habituelles.
Ca a toujours été limite entre les deux grands disques de Therapy? en ce qui me concerne, mais en m'y replongeant là, c'est presque une évidence : ce disque difficile d'accès, complexe et baroque est définitivement le grand-oeuvre d'un groupe qui a su refuser la facilité et se réinventer en prenant tous les risques pou aboutir à un disque unique et bouleversant.
En plus, le (seul, dans ce cas) disque bonus est lui aussi une merveille. Seulement 2 remixes inutiles à jeter. A côté de ça 9 versions acoustiques de chansons des deux grands albums du groupe (+ Opal Mantra et Disgracelands), disponibles auparavant sur les maxis sortis à l'époque, magnifiques et transfigurant les versions originales. Et 7 versions live de chansons principalement extraites de Troublegum (mais pas que), terrassantes de puissance et de rage.
Grandiose.