Ma lecture du moment

Cyrille a écrit: Morwenna de Jo walton me bouleverse. Je ne trouve pas d'autre mot. Il ne me reste que 60 pages et quitter ce livre est déjà un crève cœur.

Commencé ce matin - et au bout de 40 pages je pense que je vois déjà pourquoi (et ça va me faire le même effet) !

Dévoré dans la journée DELIRIUM, la bio (ou plutôt "l'autoportrait") de Philippe Druillet - c'est excellent et que du bonheur. Outre que l'écriture acérée, pleine d'humour, de lucidité et de méchanceté (mais qui sait aussi émouvoir, voir par exemple les pages consacrées à la mort de sa première femme), le livre vaut surtout pour :
- la "révélation" de l'histoire collaborationiste de ses parents et ce qu'il en dit (jusque dans la manière dont ça influence sa vie)
- la description du foisonnement artistique et de l'explosion de la BD dans les années 60 à 80, à grand coup de name dropping, d'anecdotes démentes, la bouteille à la main et le nez greffé à la poudre.

Tu l'as pris à la bibli ?

Ouaip, mais je lu tout de suite donc je l'ai pour un moment encore; je peux te le prêter !

Si on arrive à se voir, avec plaisir

Lu L'EVANGILE CANNIBALE de Fabien Clavel, suite à une bonne critique dans le dernier Bifrost. Et en effet, c'est très bien; un bon petit livre nerveux et gore, plein d'humour noir.
Une histoire de zombies plutôt original qui repose sur deux points forts. 1/ Le traitement de son thème principal rebattu sous de nouveaux angles plutôt intéressants (l'origine de l'épidémie, le fait de situer ça dans Paris et sa banlieue désertés - dont une partie chez moi à Nanterre et à la Def' - la réinvention des constantes des histoires de zombies, les références au cinéma bien digérées). 2/ Le récit raconté à la première personne par un vieux bonhomme parano et misanthrope - ce qui nous vaut quelques pensées cyniques et des situations complètement délirantes. Sans compter que c'est bien la première fois qu'on confronte aux hordes de zombies une bande de petits vieux séniles échappés d'un hospice et qui fuient les goules en fauteuils roulants ! A noter que ça se situe dans une France futuriste décrite par petites touches - à peine effleurée, malheureusement, le livre ne visant que l'efficacité pure du divertissement.
Le livre est complété d'une interview de l'auteur par quelqu'un de chez ActuSF (éditeur du livre), qui explique sa démarche et tout ce qu'il a voulu faire ici. C'est très intéressant, et ça donne presque envie de le relire histoire d'y repérer tous les petits trucs loupés la première fois.

J'ai commencé ce week end "Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire" et c'est très bon pour le moment c'est bourré d'humour noir et de truc abracadabrantesque. On a vu d'ailleurs Dimanche en allant au ciné qu'ils allaient en faire un film. En parallèle je lis aussi le "Guide de survie en territoire Zombie" du fils de Mel brooks, plutôt pas mal fait dans son genre

Ouais, c'est super sympa le Guide de Survie... j'en cause dans le sujet sur WWZ.
J'aime bien le fait que ça reste du début à la fin scotché sur le concept comme si c'était un "vrai" guide de survie et que ça risquait d'arriver demain (tout en étant plein d'humour dans l'écriture)   

Phil a écrit:

Dévoré dans la journée DELIRIUM, la bio (ou plutôt "l'autoportrait") de Philippe Druillet - c'est excellent et que du bonheur. Outre que l'écriture acérée, pleine d'humour, de lucidité et de méchanceté (mais qui sait aussi émouvoir, voir par exemple les pages consacrées à la mort de sa première femme), le livre vaut surtout pour :
- la "révélation" de l'histoire collaborationiste de ses parents et ce qu'il en dit (jusque dans la manière dont ça influence sa vie)
- la description du foisonnement artistique et de l'explosion de la BD dans les années 60 à 80, à grand coup de name dropping, d'anecdotes démentes, la bouteille à la main et le nez greffé à la poudre.

Géné par la forme (espèce de retranscription d'interview en respectant le style du langage de Druillet), mais assez intéressant sur le fond

Ouais, je vois ce que tu veux dire - ça prend son sens à la fin quand il explique la genèse du livre mais ça peut gêner.

MOXYLAND est le premier roman de la sud-africaine Lauren Beukes, sorti chez nous récemment, après le très beau "coup" éditorial des Lumineuses - dont je parle sur ce sujet en page précédente. Comme j'avais adoré ce troisième roman de l'auteure, me suis jeté sur celui là. Qui est moins bon. Mais pas honteux, loin de là. Il s' en faut d'ailleurs de peu pour que ce soit une franche réussite.
Tout le contexte d'une Afrique du Sud sous le joug d'un nouvel apartheid social et technologique est prenant et très bien décrit. L'anticipation du monde asservi aux technologies de la communication, à la nanobiologie, aux drogues et aux univers virtuels, est assez saisissante. Malheureusement, ça pêche du point de vue de la narration et des personnages, auxquels on n'arrive pas à s' intéresser. Ça se lit néanmoins très bien grâce à l'univers que ça développe, même si on se fout de l'histoire.

(TROIS de Sarah Lotz)

Je suis tombé il y a quelques semaines devant ce livre opportunément agrémenté d’un bandeau l’adoubant comme « un des meilleurs thrillers fantastiques que j’ai lu ces dernières années » (ou un truc comme ça) par un certain Stephen King. Ca sentait l’opération commerciale à plein nez, mais comme il me fallait un livre léger et pas prise-de-tête pour terminer les vacances, me suis dit que je pouvais tenter ça (en Epub anglais, finalement)…
Et j’ai bien fait, parce que c’est tout à fait la came annoncée, et ça constitue un très bon divertissement sans tomber dans le racolage bas-du-front de la sous-littérature Levy-Musso-esque (il y a d’ailleurs une très bonne vanne contre Paulo Coehlo vers la fin).

L’auteure est en fait plus connue pour son travail de scénariste pour la télé et le cinéma américain. Et ça se sent, en ce sens que c’est pas de la grande littérature, et que c’est plus orienté vers l’histoire et le concept, plus « action » que « réflexion », donc. Un concept intriguant et accrocheur, d’ailleurs : en janvier 2012, 4 avions s’écrasent sur 4 continents au même moment, et il n’y a que trois survivants, à chaque fois un enfant de 7-8 ans (sachant qu’à un moment, on partira aussi à la recherche d’un éventuel survivant dans le quatrième avion crashé en Afrique). Le livre est raconté sous la forme de témoignages divers qui reconstituent l’histoire après-coup; un peu à la World War Z version bouquin... (en fait, c'est un peu plus que ça puisqu'il y a un livre dans le livre, mais bon). Un procédé qui permet de maintenir le mystère tout du long, et de jouer à fond sur l’attente d’événements qu’on sait devoir arriver.
On suit donc une histoire très plaisante, avec des personnages attachants et d’autres parfaitement dégueulasses et tout aussi intéressants. Jusqu’à une fin plutôt ambitieuse, qui décrit un monde en plein bouleversement socio/politico/écnomomique, où les Etats-Unis deviennent une théocratie dictatoriale préparant la fin des temps (puisque les trois enfants + 1 autre potentiel y sont vus comme les cavaliers de l’apocalypse) et le Japon s’allie à la Chine et la Corée pour former un nouvel ensemble.
Quant à la « résolution de l’énigme », elle n’est pas explicite et laisse suffisamment de pistes ouvertes pour laisser place à l’interprétation du lecteur pas trop con tout en réservant la possibilité pour l’auteur de nous balancer une éventuelle suite dans quelques années.

Pas le livre du siècle, pas du niveau d’un King, de son fils ou d’un bon (donc un vieux) Simmons, mais de la bonne « série B littéraire » très influencée par les séries actuelles (on pense évidemment beaucoup à Lost), qui se lit toute seule et fait plaisir.

J'ai acheté hier Le Royaume d'Emmanuel Carrère, qui a l'air d'être de la bombe. Mais je pense le lire après le Murakami qui sort jeudi prochain

Un peu après la bataille (enfin, un peu.. 7ans après), je viens de lire L'insurrection qui vient

Dispo gratuit ici http://www.lafabrique.fr/spip/IMG/pdf_Insurrection.pdf

Un très grand texte

Et du coup j'ai revu le Dans Le Texte de l'époque, pas inintéressant, que je suis content d'avoir revu après lecture
http://www.arretsurimages.net/emissions/2009-05-05/Eric-Hazan-et-l-insurrection-d-ns-le-texte-id1922

Bref, je trouve ce texte très actuel, dans une France Sarko-Valssienne

Je me suis tout juste lancé (sur les conseils de Cyrille) dans la trilogie du Loup-Garou et en ai profité pour acheter le tout dernier Rites de Sang ... très accrocheur pour l'instant.

Pas encore lu ce dernier volet, mais j'avais trouvé le précédent mortel (moins le premier, même si très bon).

De mon côté, commencé aujourd'hui Karoo de Steve Tesich - un bouquin paru juste après la mort prématurée de son auteur en 1996 et qui est paraît-il un chef d'oeuvre maudit bien dark. (pour l'instant, il est en effet noirissime)

Ouais, je viens de finir le troisième, bien aimé.

Phil a écrit:De mon côté, commencé aujourd'hui Karoo de Steve Tesich - un bouquin paru juste après la mort prématurée de son auteur en 1996 et qui est paraît-il un chef d'oeuvre maudit bien dark. (pour l'instant, il est en effet noirissime)

Bon, c'est très bien et très sombre... mais pas un chef d'oeuvre pour autant, et ça aurait pu être encore pire ! Il y a même tout un passage au milieu du livre plutôt positif - qui sert certes à enfoncer encore plus le personnage par la suite, mais évite à l'ensemble du livre d'être trop plombé.
Après, ce genre de bouquin décrivant la psyché tordue d'un personnage totalement inadapté social et vivant hors du monde est toujours glaçant. Quand c'est bien fait, et c'est le cas ici. On pense souvent à "American Psycho" (sans la violence) ou "A Rebours"; et si le livre n'est clairement pas à la hauteur de ces modèles, il n'a pas à rougir de la comparaison malgré tout.

Fini Rites de Sang; bien aimé mais beaucoup moins que le deux autres et suis globalement un peu déçu. Je recopie ce que j'ai mis chez Cyrille :

Après lecture, je suis assez d'accord avec toi, en allant même plus loin : j'ai trouvé ce dernier volet beaucoup moins bien que les deux autres (et surtout le second, que j'avais trouvé excellent). Parce qu'il y a moins d'action, déjà, et plus de délayage pas très intéressant. Du coup, on a l'impression que Duncan se regarde un peu trop écrire, et son style ampoulé m'a paru moins digeste que d'habitude.
Et surtout, ça n'est en rien une conclusion à la trilogie ! Il y a bien une forme de résolution à la fin, mais beaucoup trop de trucs restent en suspens. De telle sorte que je le vois bien continuer à nous balancer des loups-garous dans les années à venir jusqu'à plus soif...

En attendant "Le paradoxe de Fermi", de Jean Pierre Boudine, que je pensais avoir ce week end, mais non, j'ai dévoré "En des cités desertes" de Lewis Shiner. excellent bouquin.

Phil a écrit:UNE ANNEE STUDIEUSE d'Anne Wiazemski - récit de la liaison de la petite-fille de François Mauriac avec Jean-Luc Godard à la fin des années 60, des prémisses de Mai 68 à Nanterre, du tournage de La Chinoise - et à travers tout ça portrait d'une jeune fille qui veut s'émanciper des carcans de la petite bourgeoisie pompidolienne, plongée au sein de l'effervescence politique, artistique et intellectuelle de l'époque.
Typiquement le genre de truc qui n'intéresse que moi (parce que c'est quand même surtout concentré sur la relation avec Godard), mais en cela, ça fonctionne très bien.

La suite, UN AN APRES, est tout aussi intéressante. Probablement plus, même, puisque l'auteure aborde les événements de Mai 68, et le virage radical de Godard qui fonde le "Collectif Dziga Vertov" à ce moment là. La description des événements et le portrait sans concession du réalisateur caractériel sont fascinants.
La fin du livre est très bien aussi, dans son refus du "voyeurisme littéraire" qui a trop souvent cours de nos jours. Wiazemski explique que la fin de son mariage avec Godard n'est pas intéreressante parce qu'elle n'est plus le témoin d'une époque, mais une femme dans une banale histoire de divorce. Et qu'elle ne la racontera donc pas.
Beau geste.

LES INITIES de Thomas Bronnec est un thriller financier au coeur des arcanes de Bercy et s'appuyant sur la crise de 2008 et le plan de sauvetage des banques. Très intéressant d'un point de vue économique et politique, il pèche néanmoins sur le reste : personnages survolés, pas de progression dramatique, ni de suspense... L'auteur avait déjà publié un livre sur le ministère des finances et collaboré à des documentaires économiques; le passage à la fiction ne lui apporte pas grand-chose.
ça se lit malgré tout sans difficulté, rapidement, et quand on s'intéresse au sujet, ça passe bien.

7 de Tristan Garcia est sous-titré "Romans" (avec un "s") sur la couverture. A la lecture, ça se rapproche beaucoup d'un fix-up, sans en être tout à fait un - mais on imagine que dans une collection blanche prestigieuse chez Gallimard, ils doivent avoir peur du terme ! De fait, tout est fait pour camoufler la nature profonde du livre. Car de quoi s'agit-il ? Ni plus ni moins que d'un ensemble de textes touchant à la SF et/ou au fantastique, dont "l'explication finale" est purement du domaine de de ces genres; d'un livre qui touche à ce que la SF a de plus pur dans ses intentions : décrire le monde et l'homme par le filtre de l'imaginaire.

Le livre est constitué de 6 nouvelles indépendantes (mais dont certains détails se retrouvent de l'une à l'autre) et d'un court roman (250 pages) tournant autour d'un homme immortel qui revit la même vie à chaque réveil après la mort (ça fait très Un jour sans fin dans le principe).
Toutes les parties sont à la fois très ancrées dans le réel - nombre de références à la France d'aujourd'hui, des personnages très réalistes et définis dans leur quotidien... - et en même temps plongent clairement dans le SF ou le fantastique. A chaque fois, ces éléments imaginaires sont légers (sauf dans la nouvelle sur les "bulles futuristes"), et toujours abordés avec le même sérieux et la même rigueur que les aspects hors genre du livre.

Comme toujours, toutes les parties ne sont pas aussi réussies - j'adore les trois premières nouvelles, moins les trois autres; et le mini-roman est mortel.
Mais Tristan Garcia parvient toujours à tenir le lecteur en haleine. Surtout, il y a une force dans ces récits, même les moins bons, assez impressionnante. C'est la réussite du livre, de nous emporter dans ses différents univers romanesques jusqu'à y être captivé. Pour ça, Garcia mélange les références diverses, pioche à tous les genres, multiplie les pistes, les indices et les clés de lecture. Et au final, le livre s'avère être l'illustration totale du discours qu'il sous-tend : la réaffirmation du pouvoir de la fiction sur le réel.

Au delà de sa construction et du genre de suspense qui court tout du long - à savoir : "comment tout ça va-t-il se raccrocher ?" - 7 est un livre fascinant, foisonnant, politique et poétique.
(peut-être juste parce qu'il touche à des sujets qui me parlent, mais je ne pense pas)
Je ne lirai évidemment pas le centième des livres de la rentrée, mais je peux quand même dire qu'il serait dommage de passer à côté de celui-là !


+ la critique de Télérama, qui m'a donné envie de lire le bouquin : http://www.telerama.fr/livres/7,130728.php

Je le note !

J'espère que c'est pas juste "un emballement de Phil" et que ça te plaira !
(je pense que oui)