Comment trouver les mots pour les parler de CHACUN SA VIE, la dernière merveille en date de notre ami Claude Lelouch, tant la vision de la chose est une épreuve désarmante, qui annihile toute possibilité critique en même temps que toute proposition de cinéma ?
Il suffirait de dire que, chaque fois qu'on croit que Lelouch ne peut pas aller plus loin, il continue de nous surprendre en creusant encore plus profond.
De dire, encore, que c'est probablement un de ses pires films (même si c'est toujours ultra drôle au 150ème degré).
Que, même pour du Lelouch, c'est extrêmement mauvais.
Vous voyez ce que ça peut donner ?
Eh bien, imaginez encore pire que ça.
Ce qui est magnifique, dans cette merdasse ultime, c'est que c'est bien la quintessence du cinéma lelouchien. Une de ses fresques où s'entrecroisent les destins de tout un tas de personnages, à grand renfort de hasards, de coïncidence, et de signes du zodiaque.
Un festival d'acteurs en roue libre où l'on retrouve toutes les chèvres habituelles de ses films, qui viennent ici simplement faire parfois un petit coucou dans une courte scène.
Un festival d'aphorismes lelouchiens pathétiques et de sentences qui se voudraient profondes mais ne sont que ridicules.
Un tourbillon de musiques à chier, de chansons nazes et de bande-son atroce.
Un catalogue de clins d'oeil navrants au statut de ses vedettes (Johnny en veux-tu (pas) en voilà), à la vie de tous les jours, à l'amour, aux oiseaux et aux petites fleurs.
Un empilage de scènes interminables trois fois trop longues qui tournent en rond pour ne rien dire.
Mais, si ce n'était que ça, ça ne serait jamais qu'une merde de plus dans la filmographie d'une réalisateur qui les collectionne déjà par paquets.
Le pire, dans le film, c'est son fond rance, puant au possible.
Avant la séance (parce qu'on est arrivé bien assez tôt, avec Cyrille et Claire, histoire d'être surs de ne rien louper !), on discutait de notre réalisateur préféré, et notamment de ses orientations politiques bien à droite. On ne croyait pas si bien dire.
Chacun sa vie est le premier film de l'ère Marine Le Pen. Réac, vulgaire, sexiste, homophobe, raciste, misogyne, inconscient, racoleur, putassier. Un festival de réflexion de bistrot du coin et d'idées nauséabondes.
On ne compte plus les répliques et scènes qui mettent mal à l'aise, avant de faire franchement rigoler tellement c'est mauvais :
- L'altercation entre Ramzy et sa meuf qui jouent une scène à la terrasse d'un café en alignant les clichés sur les arabes, l'islam, les banlieues; dignes du troquet du coin.
- L'avocat campé par Francis Huster qui fait acquitter un mec accusé de viol en disant que la victime l'avait cherché et qu'elle faisait partie d'un réseau de putes des pays de l'est (!!!) - tout ça parce que la soeur de l'accusé lui a proposé de coucher avec lui s'il faisait acquitter son frère (re !!!)
- Le personnage de Christophe Lambert qui réclame qu'on lui applique la peine de mort.
- Michel Leeb qui pense qu'on paie trop d'impôts.
- La super réplique : Le mariage pour tous, c'est aussi le divorce pour tous
- La scène HAL-LU-CI-NAN-TE ou Philippe Lellouche propose à deux flics de se taper sa jeune maîtresse (jouée par sa vraie femme dans la vie, Vanessa Demouy !) pour s'éviter une prune. Et l'un des flics qui préfère se taper Lellouche. Qu'est-ce qu'on se marre.
etc etc...
Ahurissant de connerie et de laideur.
Heureusement qu'on a quand même bien rigolé, pour compenser tout ça !
(spécial dédicace, aussi, au couple qui n'a pas eu le courage d'aimer de rester jusqu'au bout. Vous avez loupé quelque-chose de grand, les gens !)