Comme l'année dernière, j'ai entamé mon année de lecture par une relecture de King, dans mon cycle intégral entamé il y a maintenant 10 ans (ça ne nous rajeunit pas !) - j'arrive bientôt au bout, d'ailleurs.
Là, donc, ROADMASTER, livre entamé par l'auteur juste avant son accident, et terminé bien longtemps après, pour une sortie en 2002. Il s'agit donc d'un de ses livres de "réadaptation à l'écriture" - dans une période dont j'ai déjà parlé après coup, où il aligne les livres intéressants, mais pas totalement réussi.
Le défaut du livre découle directement des intentions de l'auteur, comme il l'indique dans sa classique postface. Outre l'envie de raconter cette histoire particulière (celle d'une mystérieuse voiture qui semble être un point de transfert vers un univers parallèle, gardée par des policiers au fin fond de la Pennsylvanie pendant des années), King voulait plus précisément illustrer le fait que de nombreux mystères de la vie restent mystérieux, ne trouvent jamais d'explication. Il y a donc une sorte de frustration à ce que l'histoire se conclue sans apporter de "réponses". Non que je veuille forcément qu'on me donne tous les tenants et aboutissants d'une histoire; et d'ailleurs la fin du livre est plutôt bonne, dans le cadre de sa logique interne. Mais pas satisfaisante du point de vue de la narration.
Un autre problème est le récit à plusieurs voix. Une technique que King a déjà utilisée avant et après, souvent avec plus de réussite. Ici, il arrive que les changements de narrateur soient artificiels. Et puis, vers le milieu du livre, le procédé est modifié, sans aucune cohérence avec ce qu'on a lu jusque là, avant de revenir au rythme du début du livre dans le dernier quart. J'ai parfois eu l'impression que King tentait des expériences sur la narration de son livre, mais ne parvenait pas à un résultat complètement fiable.
Après, ça reste malgré tout très plaisant.
Les personnages sont des archétypes kingiens qu'on est toujours content de retrouver de livre en livre. Et le suspense fonctionne, agrémenté de quelques scènes d'horreur efficaces.
Un "petit King", qui vaut mieux que la production de n'importe quel tâcheron du fantastique, et qui se lit comme un intermède léger dans un oeuvre bien plus monumentale.
(Sachant qu'une théorie court chez les aficionados de King, qui rattacherait ce livre au cycle de La Tour Sombre. La Buick "hantée" du livre servant de passage entre notre Terre et l'univers parallèle dans lequel se déroulent les aventures de Roland. Le véhicule serait alors une de ces voitures voyantes conduites par les "crapules de bas étage" de Coeurs perdus en Atlantide.
à la relecture, j'ai cherché des indices dans le livre qui permettraient d'étayer cette hypothèse. Rien de précis, mais c'est vrai que ces idées peuvent être émises à partir de ce qui y est raconté. Ou pas)