A peu près tout est dit. Très très bien !Phil a écrit:Contrairement à la déception juste au-dessus, le second film de l'espagnol Rodrigo Sogoroyen vaut largement le coup, lui ! Et confirme les espoirs placés sur le réalisateur au moment de l'excellent Que Dios nos perdonne (même si c'est un peu moins bien ici).
Avec EL REINO, on reste dans le thriller et le suspense, en plongeant encore plus du côté de la politique et moins dans le polar pur. On y suit un député (formidable Antonio de la Torre, définitivement un des meilleurs acteurs espagnols (mais pas que) actuels) pris dans une sombre histoire de corruption, qui doit se débrouiller pour sortir du sac de noeuds dans lequel il s'est lui-même fourré. Et quand je dis "on suit", c'est exactement ça : pendant 2h10, la caméra lui colle au basques, de très près, suit tous ses agissements, ne le lâche pas d'une semelle. Un véritable exercice de mise en scène - les idées trouvées par Sogoroyen à la fois pour dynamiser l'action et pour transcrire les événements, sont sans cesse renouvelées et originales.
Au service d'un scénario solide et intelligent. D'un côté, le film reste très général, ne nomme pas un parti ou des personalités clairement identifiés; ce qui lui permet d'être universel, de dénoncer un système politique et financier global, plutôt que de se concentrer sur un seul point. De l'autre, le personnage de Manuel Lopez Vidal est captivant, en ce sens qu'il n'est pas un héros typique qui va connaître un arc de rédemption basique. C'est au contraire un enfoiré, plein de défauts (mais pas seulement), qui échoue souvent dans sa quête de vérité, dont le but même n'est pas de faire éclater la justice, mais de se blanchir, ou à défaut de faire tomber tous ses complices en même temps que lui. Le film aboutit alors à une fin en suspens, qui peut être frustrante d'un point de vue narratif, mais conclut logiquement cette histoire d'un point de vue thématique. Sans compter que cette fin vient dans une dernière demi-heure qui multiplie les séquences enthousiasmantes de haute volée (la discussion sur le balcon / la fuite / l'intrusion dans la maison du député / la station-service / la poursuite envoiture / l'émission télé - ouch, quelle séquence !)
Dans un pays où les récompenses veulent dire quelque-chose, plus que nos Césars et les Oscars américains, le film a remporté une tripotée de trophées aux dernier Goyas espagnols (dont "Meilleur ffilm", "Meilleur réalisateur", "Meilleur acteur"...). C'est amplement mérité, et si ça permet de faire la lumière sur ce superbe film à ne pas louper, tant mieux !
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